Dieu est un concept "bouche-trou"

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Argument pourCet argument est une justification de Dieu n'est que le nom de notre ignorance.
Mots-clés : Dieu[ modifier ].

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« Croire en Dieu, d’un point de vue théorique, cela revient toujours à vouloir expliquer quelque chose que l’on ne comprend pas – le monde, la vie, la conscience – par quelque chose que l’on comprend encore moins : Dieu. Comment se satisfaire, intellectuellement, d’une telle démarche ? […] Les explications (d’ordre surnaturel, non scientifique) que les religions prétendent apporter – par exemple à l’existence du monde, de la vie ou de la conscience – ont en commun de n’expliquer rien, sinon par de l’inexplicable ! C’est bien commode, et bien vain. Il est clair que sur le monde, sur la conscience, sur la vie, je ne comprends pas tout. Il y a de l’inconnu ; c’est ce qui permet à la connaissance de progresser. Il y en aura toujours ; c’est ce qui nous voue au mystère. Mais pourquoi ce mystère serait-il Dieu ? D’autant qu’il est tout aussi clair que, sur Dieu, je ne comprends rien – puisqu’il est par définition incompréhensible ! C’est ce qui fait de sa volonté, comme disait Spinoza, « l’asile de l’ignorance». On s’y réfugie pour expliquer ce qu’on ne comprend pas. La religion devient la solution universelle, comme un passe-partout théorique – mais qui n’ouvrirait que des portes imaginaires. À quoi bon ? Dieu explique tout, puisqu’il est tout-puissant : mais vainement, puisqu’il expliquerait aussi bien le contraire. Le Soleil tourne autour de la Terre ? C’est que Dieu l’a voulu. La Terre tourne autour du Soleil ? C’est que Dieu l’a voulu. Nous voilà bien avancés ! Et que vaut cette explication, dans l’un ou l’autre cas, dès lors que Dieu lui-même reste inexplicable et incompréhensible ? »

André Comte-Sponville, L'esprit de l'athéisme.

« La recherche d’exemples particuliers de complexité irréductible est une façon de procéder fondamentalement non scientifique, un cas spécial d’argumentation fondée sur l’ignorance actuelle. Elle fait appel à la même logique biaisée que la stratégie du « Dieu des lacunes » que condamnait le théologien Dietrich Bonhoeffer. Les créationnistes cherchent fiévreusement un trou dans les connaissances ou les explications actuelles. Si l’on trouve une lacune apparente, on présuppose par défaut que c’est Dieu qui doit la combler. Ce qui préoccupe les théologiens sérieux, comme Bonhoeffer, c’est qu’avec les avancées de la science, ces lacunes s’amenuisent et Dieu risque de n’avoir pratiquement plus rien à faire et nulle part où se cacher. Mais ce qui préoccupe les scientifiques, c’est autre chose. Dans la démarche scientifique, il est essentiel que l’ignorance ait droit de cité, et même que l’on s’en réjouisse en y voyant un défi pour de nouvelles conquêtes. Comme l’a écrit mon ami Matt Ridley : « La plupart des scientifiques s’ennuient devant ce qu’ils ont déjà trouvé. C’est l’ignorance qui les stimule. » Les mystiques exultent dans le mystère et ils veulent qu’il reste mystérieux. Les scientifiques exultent aussi dans le mystère, mais pour une autre raison : il leur donne quelque chose à faire. Plus généralement […], un des effets vraiment pernicieux de la religion, c’est qu’elle nous enseigne que c’est une vertu que de se satisfaire de ne pas comprendre. »

Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, Robert Laffont, 2008.

« Il reste encore beaucoup à faire, bien sûr, et je suis sûr que ce travail se fera. Jamais il ne se ferait si les scientifiques se satisfaisaient d’une réponse paresseuse par défaut telle que celles qu’encourage la « théorie du dessein intelligent ». Voici le message qu’un « théoricien du dessein intelligent » pourrait adresser aux scientifiques : « Si vous ne comprenez pas comment fonctionne une chose, peu importe, ne cherchez pas plus loin et dites que c’est Dieu qui l’a créée. Vous ne comprenez pas comment fonctionne l’impulsion nerveuse ? Bien ! Vous ne comprenez pas comment les souvenirs sont stockés dans le cerveau ? Excellent ! Est-ce que la photosynthèse est un processus d’une complexité déroutante ? Merveilleux ! Je vous en prie, arrêtez de travailler à ce problème, laissez cela et faites appel à Dieu. Chers scientifiques, surtout ne travaillez pas sur vos mystères, confiez-les-nous car ils peuvent nous servir. Ne gaspillez pas une ignorance précieuse en la faisant disparaître par vos recherches. Nous avons besoin de ces merveilleuses lacunes pour en faire le dernier refuge de Dieu. »

Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, Robert Laffont, 2008.

« Pourquoi Dieu est-il considéré comme une explication à quoi que ce soit ? C’est un échec à expliquer, un haussement d’épaules, un « j’sais pas » déguisé en spiritualité et en rituel. Si quelqu’un impute une chose à Dieu, ce que cela signifie en général, c’est que comme il n’en a pas la moindre idée, il l’attribue à un esprit dans les cieux, impossible à atteindre et à connaître. Demandez une explication sur le lieu d’où vient ce gars, et il y a bien des chances que vous receviez une réponse vague et pseudo-philosophique disant qu’il a toujours existé, ou qu’il est en dehors de la nature. Ce qui, bien sûr, n’explique rien. »

Jerry A. Coyne, « God in the Details: the Biochemical Challenge to Evolutio », Nature, n°383, 1996.

« Les scientifiques animés d'un véritable esprit d'humilité face aux processus naturels préfèrent ne tirer aucune conclusion des probabilités effectivement très faibles et des « trous explicatifs » auxquels on aboutit dans l'état actuel de nos connaissances. Cette attitude se révèle d'ailleurs féconde : il arrive souvent que les failles dénichées par les antidarwiniens soient comblées quelques années plus tard par les avancées de la biochimie. On pourra, pour s'en rendre compte, se reporter à l'ouvrage du biochimiste Michael Denton (Nature's Destiny, 1997), où il reconnaît que les arguments antidarwiniens qu'il avait avancés dans son précédent livre (Evolution. A Theory in Crisis, 1985) ont été réfutés entretemps par le séquençage du génome, qui a montré que les arguments fondés sur la rareté des formes fonctionnelles étaient infondés. Il en va de même pour Michael Behe, qui a mis le doigt sur de vraies difficultés, de véritables énigmes, mais que l'on voit peu à peu se résoudre. »

Frédéric Guillaud, Dieu existe, Éditions du Cerf, 2013.

RéférencesRéférences

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  • Argument contreUn argument infalsifiable

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