Lénine a violemment réprimé les paysans
Résumé
Citations
« Désormais privé du grenier à blé de l’Ukraine, occupée par les Allemands, n’ayant rien à proposer aux paysans en échange de leurs récoltes puisque les « nationalisations » avaient désorganisé l’industrie, Lénine se trouva confronté au problème du ravitaillement des villes, îlots de pouvoir bolchevik au milieu de l’océan des campagnes hostiles. En mai 1918, il accusa donc les paysans « riches » de stocker leur blé, lança le cri de « Mort aux koulaks ! » – était stigmatisé comme koulak tout paysan qui résistait au pillage – et instaura le « communisme de guerre ». Ainsi débuta une guerre entre la paysannerie – les « verts » –, qui représentait 85 % de la population et le pouvoir ; les paysans, qui n’avaient que leur récolte pour survivre, se défendirent avec l’énergie du désespoir et des révoltes éclatèrent un peu partout à l’été 1918. La riposte de Lénine fut terrible. Le 10 août, il envoyait un télégramme au comité bolchevik de Penza, dans la région de la Volga :
« Camarades ! Le soulèvement koulak […] doit être écrasé sans pitié. Les intérêts de la révolution tout entière l’exigent, car partout la « lutte finale » avec les koulaks est désormais engagée. Il faut faire un exemple : 1. Pendre (et je dis pendre de façon que les gens le voient) pas moins de 100 koulaks, richards, buveurs de sang connus. 2. Publier leurs noms. 3. S’emparer de tout leur grain. 4. Identifier les otages […] Faites cela de façon qu’à des centaines de lieues alentour les gens voient, tremblent, sachent et s’écrient : ils tuent et continueront de tuer les koulaks assoiffés de sang […]. Vôtre Lénine. PS : Trouvez des gens plus durs. »
Et encore le 1er février 1920, dans une lettre à Trotsky, Lénine exigeait que soit réduite la ration de pain des ouvriers ne travaillant pas pour les transports : « Que des milliers de gens périssent si nécessaire, mais le pays doit être sauvé. » Dans son délire idéologique, Lénine assimilait le pays au pouvoir bolchevik qui, au même moment, par sa folle politique, détruisait le pays réel. »
« La lutte contre les paysans refusant les réquisitions et la conscription – les Verts – mobilisaient toutes les énergies. Les rapports, aujourd’hui disponibles, des départements spéciaux de la Tcheka et des Troupes de défense interne de la République, chargés de lutter contre les mutineries, les désertions et les émeutes paysannes, révèlent dans toute son horreur l’extraordinaire violence de cette « sale guerre » de pacification menée en marge des combats entre Rouges et Blancs. C’est dans cet affrontement crucial entre le pouvoir bolchevique et la paysannerie que se forgea définitivement une pratique politique terroriste fondée sur une vision radicalement pessimiste des masses « à ce point obscures et ignorantes, écrivait DzeIjinski, qu’elles ne sont même pas capables de voir où est leur propre intérêt ». Ces masses bestiales ne pouvaient être matées que par la force, par ce « balai de fer » qu’évoquait Trotsky pour caractériser de manière imagée la répression qu’il convenait de mener afin de « nettoyer » l’Ukraine des « bandes de bandits » dirigées par Nestor Makhno et d’autres chefs paysans. »
« Le problème vital était donc d’assurer le ravitaillement de l’armée et des villes, lieu du pouvoir et siège du « prolétariat ». Deux possibilités s’offraient aux bolcheviks : soit rétablir un semblant de marché dans une économie en ruine, soit utiliser la contrainte. Ils choisirent la seconde, persuadés de la nécessité d’aller de l’avant dans la lutte pour la destruction de « l’ordre ancien ». Prenant la parole le 29 avril 1918 devant le Comité exécutif central des soviets, Lénine déclara sans ambages : « Oui, les petits propriétaires, les petits possédants ont été à nos côtés, nous autres prolétaires, lorsqu’il s’est agi de renverser les propriétaires fonciers et les capitalistes. Mais maintenant nos voies divergent. Les petits propriétaires ont horreur de l’organisation, de la discipline. Le temps est venu pour nous de mener une lutte impitoyable, sans merci, contre ces petits propriétaires, ces petits possédants. » Quelques jours plus tard, le commissaire du peuple au Ravitaillement précisa, devant la même assemblée : « Je le dis ouvertement : il est bien question de guerre, ce n’est qu’avec des fusils que nous obtiendrons les céréales. » Et Trotsky de renchérir : « Notre parti est pour la guerre civile. La guerre civile, c’est la lutte pour le pain… Vive la guerre civile !» »