Lénine a créé une police politique : la Tchéka
Résumé
Citations
« Le 20 décembre [1917], Lénine créait la Tcheka – la Commission extraordinaire de lutte contre la contre-révolution, la spéculation et le sabotage –, une police politique qui, de manière arbitraire, commença à arrêter, puis à fusiller. Alors que le bolchevik Boukharine protestait que la Tcheka était « truffée de criminels et de sadiques, d’éléments dégénérés du lumpenprolétariat », Lénine répondit qu’elle était « injustement attaquée pour quelques excès par une intelligence bornée […] incapable de considérer le problème de la terreur dans une perspective plus large ». Et de conclure : « Un bon communiste est aussi un bon tchékiste. » En 1921, la Tcheka compterait déjà 200 000 hommes et cette police politique – devenue GPU, puis NKVD et enfin KBG – serait, avec le Parti bolchevik et l’Armée rouge – armée de guerre civile créée par un décret du 28 janvier 1918 –, l’un des trois piliers du pouvoir totalitaire. »
« À partir du 20 décembre 1917, avec la création de sa police politique, la Tcheka, Lénine se donne les moyens d’instaurer la dictature du Parti bolchevique, s’appuyant sur une terreur systématique contre ses « ennemis ». Ce sont d’abord ses ennemis politiques : les « Blancs » – tous les partisans du tsar – et les libéraux (Constitutionnels démocrates, KD), puis les anarchistes, et enfin les socialistes révolutionnaires et les mencheviks. Ce sont ensuite les classes sociales ennemies : aristocrates, bourgeois, officiers, koulaks – paysans refusant les réquisitions et qualifiés de « riches » –, Cosaques, clergé. Ce sont aussi les mauvais éléments de la « bonne » classe : les ouvriers en révolte contre la dictature bolchevique. Et enfin les nations récalcitrantes à la soviétisation : Finlande, Ukraine, puis les peuples du Caucase, en particulier la Géorgie. »
« Commission « extraordinaire », la Tcheka allait prospérer et agir sans la moindre base légale. Dzerjinski, qui souhaitait, comme Lénine, avoir les mains libres, eut cette phrase étonnante : « C’est la vie même qui dicte sa voie à la Tcheka. » La vie, c’est-à-dire la « terreur révolutionnaire des masses », la violence de la rue que la plupart des dirigeants bolcheviques encourageaient alors vivement, oubliant momentanément leur profonde méfiance vis-à-vis de la spontanéité populaire. S’adressant le 1er (13) décembre [1917] aux délégués du Comité exécutif central des soviets, Trotsky, commissaire du peuple à la Guerre, prévint : « Dans moins d’un mois, la terreur va prendre des formes très violentes, à l’instar de ce qui s’est passé lors de la Grande Révolution française. Ce ne sera plus seulement la prison, mais la guillotine, cette remarquable invention de la Grande Révolution française, qui a pour avantage reconnu celui de raccourcir un homme d’une tête, qui sera prête pour nos ennemis. » Quelques semaines plus tard, prenant la parole à une assemblée d’ouvriers, Lénine appela, une nouvelle fois, à la terreur, cette « justice révolutionnaire de classe » : « Le pouvoir des Soviets a agi comme auraient dû agir toutes les révolutions prolétariennes : il a cassé net la justice bourgeoise, instrument des classes dominantes. […] Les soldats et les ouvriers doivent comprendre que personne ne les aidera s’ils ne s’aident eux-mêmes. Si les masses ne se lèvent pas spontanément, nous n’aboutirons à rien. […] Tant que nous n’appliquerons pas la terreur vis-à-vis des spéculateurs – une balle dans la tête sur place –, nous n’arriverons à rien ! » »