L'identité n'est pas quelque chose de figé
Résumé
Voir Régis Debray
http://www.slate.fr/story/149742/comment-nous-sommes-devenus-americainsCitations
« La notion d’identité me gêne aussi, car elle implique un état statique, limité, défini. Or s’il devait y avoir quelque chose comme une identité, il faudrait la comprendre comme processus, travail de soi sur soi –mais à partir d’un héritage qui limite les capacités heuristiques de ce travail de soi sur soi. Je préfère le terme de «personnalité»."
Il est faux de constituer une sorte de bloc homogène des "musulmans", des "Français", des catholiques, des juifs, car il n'existe que des personnes, traversées d'identités et d'appartenances multiples et complexes.
On est infiniment plus proches de nos contemporains que de nos coreligionaires :
"De fait, nous sommes tous infiniment plus proches de nos contemporains que de nos ancêtres. Serais-je en train d'exagérer si je disais que j'ai bien plus de choses en commun avec un passant choisi au hasard dans une rue de Prague, de Séoul ou de San Francisco, qu'avec mon propre arrière-grand-père ? Non seulement dans l'aspect, dans le vêtement, dans la démarche, non seulement dans le mode de vie, le travail, l'habitat, les instruments qui nous entourent, mais aussi dans les conceptions morales, dans les habitudes de pensée.
Ainsi que dans les croyances. Nous avons beau nous dire chrétiens – ou musulmans, ou juifs, ou bouddhistes, ou hindouistes – , notre vision du monde comme de l'au-delà n'a plus guère de rapports avec celle de nos "coreligionnaires" qui vivaient il y a cinq cent ans. Pour la grande majorité d'entre eux, l'Enfer était un lieu aussi réel que l'Asi mineure ou l'Abyssinie, avec des diables aux pieds fourchus qui poussaient les pécheurs vers le feu éternel comme dans les peintures apocalyptiques. Aujourd'hui, plus personne, ou presque, ne voit les choses de la sorte. […] Bien des comportements qui sont aujourd'hui acceptables pour le croyant auraient été inconcevables pour ses "coreligionnaires" d'autrefois. […]
En somme chacun d'entre nous est dépositaire de deux héritages : l'un "vertical" lui vient de ses ancêtres, des traditions de son peuple, de sa communauté religieuse ; l'autre, horizontal, lui vient de son époque, de ses contemporains. C'est ce dernier qui est, me semble-t-il, le plus déterminant […]. Pourtant cette réalité ne se reflète pas dans notre perception de nous-même. Ce n'est pas de l'héritage "horizontal" que nous nous réclamons, mais de l'autre.
[…] à vrai dire, si nous affirmons avec tant de rage ns différences, c'est justement parce que nous sommes de moins en moins différents. Parce qu'en dépit de os conflits, de nos inimitiés séculaires, chaque jour qui passe réduit un peu plus nos différences et augmente nos similitudes. »