Le revenu de base accentue la marchandisation du monde
Résumé
Citations
« Le grand point faible des projets de revenu universel est qu’ils visent à étendre le champ de la marchandise. Le « caractère liquide de ce revenu, donc non affecté » est ainsi clairement affirmé par Yann Moulier-Boutang. Ce point de vue peut être considéré comme réactionnaire puisqu’il équivaut à une véritable désocialisation. Tout progrès social passe en effet par un degré de socialisation accru : les fameux « prélèvements obligatoires » qui constituent la cible des néolibéraux recouvrent par exemple l’éducation et la santé, l’une et l’autre en principe gratuites. Un projet progressiste viserait à rétablir et à étendre le champ de la gratuité, à élargir les droits sociaux garantis sous forme de libre mise à disposition des services correspondants. Les tenants du revenu universel proposent au contraire aux « multitudes » de faire marche arrière, avec l’instauration d’un revenu monétaire et individualisé, et cette perspective se substitue de fait à la mobilisation pour une réduction radicale du temps de travail. Aux approximations théoriques, ils ajoutent ainsi une orientation stratégique qui a pour effet de déserter le cœur des rapports d’exploitation. La reconnaissance effective des droits sociaux passe par la mise à disposition de manière gratuite de biens communs, comme la santé, et non par la distribution de revenus qui s’y substitueraient. Dans le cas du logement, quelles sont les solutions réellement progressistes : une politique de municipalisation des sols et de construction de logements sociaux, ou l’augmentation des allocations logement ? »
« L’attribution du revenu monétaire individuel qu’est le RIB ne prend pas en compte la nécessité d’une réponse socialisée aux besoins fondamentaux. L’exemple de la santé l’illustre très clairement. Les besoins de soins de santé ne peuvent être satisfaits par l’allocation d’un revenu monétaire même élevé, comme le montre l’exemple désastreux des États-Unis. L’accès égal de tous aux soins n’est réalisable que par la gratuité, c’est à dire une réponse socialisée :
- Sécurité sociale remboursant à 100 % tous les soins et les médicaments prescrits ;
- pas d’avance de frais sur les soins et les médicaments ;
- service public de santé, proche et gratuit.
Seule l’extension du champ de la gratuité à l’ensemble des biens et services essentiels (soins de santé, éducation, logement, transports, culture, sport, réseaux de communication, eau et énergie), est en mesure de réaliser le principe « à chacun selon ses besoins ». »