L'anarchisme a montré sa faillite dans la Révolution espagnole de 1936
Résumé
Citations
« En Espagne, pays classique du bakouninisme, les anarcho-syndicalistes et ceux qu’on appelle anarchistes « spécifiques » ou purs, se refusant à la politique, renouvellent en réalité la politique des mencheviks russes. Les emphatiques négateurs de l’État s’inclinent respectueusement devant lui dès qu’il mue un peu. Mettant en garde le prolétariat contre les séductions du pouvoir, ils soutiennent avec abnégation le pouvoir de la bourgeoisie de « gauche ». Maudissant la gangrène du parlementarisme, ils passent, sous le manteau, à leurs partisans, le bulletin de vote de vulgaires républicains. Quelle que soit la solution de la révolution espagnole, elle en finira en tout cas pour toujours avec l’anarchisme. »
« Les chefs de la C.N.T. espagnole, la seule organisation anarchiste notable sur la terre, se sont changés, à l’heure critique, en ministres de la bourgeoisie. Ils expliquent leur trahison ouverte de la théorie anarchiste par la pression des "circonstances exceptionnelles". Mais n’est-ce pas le même argument qu’ont avancé, en leur temps, les chefs de la social-démocratie allemande ? Assurément, la guerre civile n’est nullement une circonstance pacifique et ordinaire, mais plutôt une "circonstance exceptionnelle". Mais c’est précisément pour de telles "circonstances exceptionnelles" que se prépare toute organisation révolutionnaire sérieuse. L’expérience de l’Espagne a démontré, une fois de plus, qu’on peut nier l’État dans des brochures éditées dans des "circonstances normales", avec la permission de l’État bourgeois, mais que les conditions de la révolution ne laissent aucune place pour la négation de l’État et en exigent la conquête. Nous n’avons nullement l’intention d’accuser les anarchistes espagnols de ne pas avoir liquidé l’État d’un simple trait de plume. Un parti révolutionnaire, même une fois qu’il s’est emparé du pouvoir (ce que les chefs anarchistes espagnols n’ont pas su faire malgré l’héroïsme des ouvriers anarchistes) n’est nullement encore le maître tout-puissant de la société. Mais d’autant plus âprement accusons-nous la théorie anarchiste qui s’est trouvée convenir pleinement pour une période pacifique, mais à laquelle il a fallu renoncer en hâte dès que sont apparues les "circonstances exceptionnelles" de la révolution. Dans l’ancien temps, on rencontrait des généraux (il s’en trouve sans doute encore maintenant) qui pensaient que ce qui abîme le plus l’armée, c’est la guerre. Les révolutionnaires qui se plaignent que la révolution renverse leur doctrine ne valent guère mieux. »